►Trois-quarts de siècle de laminage (1924 à 2002)

Froges voit s’installer en 1924 au pied du massif de Belledonne, sur le lieu dit “Le Pré” un équipement complet de laminage, provenant de la Société A.I.A.G. (Alu Suisse) destiné à fabriquer de la feuille et de la bande mince d’aluminium.

Cette entreprise Suisse, décida d’implanter un atelier avec ses propres machines à Froges, afin de pouvoir commercialiser sa production sur le territoire français, lui permettant ainsi de ne plus avoir à payer de taxes frontalières trop élevées.

Ce seront les Etablissements Charles Coquillard, aux débuts limités à une douzaine de laminoirs duos “Schmitz” et “Demag”, de conception allemande, qui seront rapidement mis en service par le personnel local.En 1945, le nombre de laminoirs de même type sera doublé ce qui permettra alors de pouvoir atteindre 1000 tonnes de produits finis l’année suivante.

De nombreuses familles immigrées de la République de San Marin sont venues s’installer dans la région et y furent employées. Ils compléteront le personnel d’origine, principalement composé d’agriculteurs du Grésivaudan.

►La Machine de Coulée Continue entre Cylindres «3C»

C’est à partir d’un laminoir du même modèle que fut prélevé le bâti qui deviendra la partie centrale d’une machine jusque-là encore inconnue, destinée à l’origine à transformer les déchets de feuilles minces en rouleaux massifs, activité plus lucrative... Après quatre années d’essais et de recherches empiriques, la techniqueretenue fut finalement la “Coulée Continue entre Cylindres”.Elle fut brevetée en 1958 et mise en exploitation continue à Froges à partir de 1960.

Plus d’une centaine de ces machines seront commercialisées entre 1940 et 2000 par Pechiney Aluminium Engineering” et installées dans de multiples usines de laminage d’aluminium à travers le monde. Cette usine prendra une certaine importance au sein des filiales du Groupe Pechiney. De ses débuts en 1940, 300 à 450 tonnes seront expédiées chaque année, avec progressivement un effectif de 200 à 450 employés d’ateliers et de bureaux. Suivant cet élan prospère, l’équipement moderne qui en suivi permit un accroissement continu de la clientèle à travers le marché international.Ce seront, dans les années 1975, des expéditions annuelles de 18 000 à 20 000 tonnes d’aluminium mince, de différentes qualités et de diverses dimensions, qui enrichiront à l’époque la commune en conséquence, avec un effectif d’un millier de personnes.

►Une époque prospère rapidement rattrapée par les contradictions de l’économie moderne

Si cette usine s’est développée et s’est fait connaître à travers le monde, c’est bien grâce à sa clientèle, conquise par la spécificité des produits livrés en temps et en heure. Du laminage jusqu'à l’emballage et l’expédition, ce sont une soixantaine d’ouvriers spécialisés qui, un homme par machine, “tournaient” en équipes 24 heures sur 24, en trois postes: matin, après-midi et nuit, par factions de 8 heures.Après la guerre, l’arrivée des machines modernes américaines pour les passes d’ébauchage, et celles construites en France pour le laminage final des produits (bandes minces et feuilles) allaient réduire le nombre d’ouvriers lamineurs, permutés à l’atelier de transformation (produits d’emballage).

Ces laminoirs étaient en constantes améliorations, pour faire face à une demande de plus en plus importante en tonnage. Mais la concurrence progressait elle aussi: et Pechiney fut absorbé par ALCAN, qui abandonna le laminage en limitant l’activité de Froges à la production de divers produits d’emballage.

L’approvisionnement de feuilles et de bandes minces provenaient d’autres usines. La loi “Prêt et Bail” du plan Marshall institué en 1950, entraînera progressivement, entre 1955 et 1960, l’installation de ces petits laminoirs d’origine dans divers ateliers à l’étranger. (Maroc, Italie, Espagne et Israël).Tous ces petits laminoirs duos, semblables à celui—ci, furent réinstallés et remis en service à l’étranger.

Le seul de ces petits laminoirs qui résista à cette délocalisation s'avéra être un outil très précieux pour effectuer des essais, faire des recherches sur des métaux nouveaux, des lubrifiants, ou encore assurer des livraisons de petites quantités, en qualité nouvelle… et ceci jusqu’en 1985 !

C’est à cette époque-là que, le retrouvant seul et destiné a être misà la ferraille qu’intervient l’idée de conserver ce bâti de ce vieux laminoir et de le sceller en pleine ville, le long du CD 523, sur la petite pelouse qui agrémente la façade ouest des ateliers, symbole de ce qu’a été le laminage aux Etablissements Charles Coquillard; en souvenir de cette époque désormais révolue…